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Âge légal, durée de cotisation, carrières longues... Le guide pour comprendre la réforme des retraites
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"Le match est en train de se terminer". Après 14 journées de mobilisation étalées sur 5 mois, le patron de la CFDT, Laurent Berger, a reconnu la semaine dernière la "défaite productive" des syndicats dans la bataille contre la réforme des retraites. Ce n'est pourtant pas faute d'avoir tout tenté pour faire plier le gouvernement, avec des appels à la grève et surtout aux manifestations, lesquelles auront rassemblé entre 1,5 et 3 millions de personnes dans les rues au plus fort de la contestation.
>> Réforme des retraites: nos experts répondent à vos questions
La bataille s'est aussi jouée au Parlement. D'abord avec le dépôt de deux motions de censure, finalement rejetées, en réponse à l'article 49.3 dégainé par le gouvernement, faute de majorité. Ensuite, par la saisine du Conseil constitutionnel qui a tout de même validé l'essentiel de la réforme. Enfin, par la tentative d'abrogation de la retraite à 64 ans via une proposition de loi du groupe Liot à l'Assemblée nationale. Sans succès.
Malgré la promulgation de la réforme mi-avril, l'intersyndicale pense avoir encore une carte à jouer en attaquant en justice les décrets d'application qui leur sembleront problématiques. Les deux premiers (sur 31) dont celui portant sur le relèvement de l'âge légal ont été publiés la semaine dernière au Journal officiel.
Pour le gouvernement il s'agit d'aller vite, sachant que le texte est censé entrer en vigueur dès le 1er septembre prochain. Avec des conséquences concrètes pour des millions de Français. A l'occasion d'une journée spéciale sur BFMTV ce lundi, BFM Business fait le point, profil par profil, sur les principaux changements induits par la réforme des retraites.
Depuis ce lundi 12 juin, le site Info Retraite a été mis à jour permettant à chacun d'estimer le montant de sa retraite et sa durée de cotisation.
>> Consultez le simulateur officiel d'Info Retraite
• Comment le report de l'âge légal de départ et l'accélération de la durée de cotisation seront-ils pris en compte?
L'objectif principal du gouvernement à travers son projet est d'assurer l'équilibre financier du système de retraites à horizon 2030. Pour y parvenir, il compte sur deux mesures fortes: le relèvement de l'âge légal de départ à 64 ans, et une accélération de la réforme Touraine qui augmente progressivement la durée de cotisation pour obtenir une retraite à taux plein.
Dans un premier temps, lors de la dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait annoncé un nouvel âge légal de 65 ans. Les concertations avec les organisations syndicales ont finalement abouti à un report de l'âge légal de départ de 62 à 64 ans. Report qui s'opérera sur le rythme de trois mois par an à partir du 1er septembre 2023 et ce, jusqu'en 2030.
Quant à la durée de cotisation, elle augmentera à raison d'un trimestre supplémentaire par an pour atteindre les 43 annuités d'ici 2027. Seuls les Français nés entre le 1er septembre 1961 et l'année 1972 incluse seront directement touchés par ce tandem de mesures. Tous ceux nés avant le 1er septembre 1961 pourront encore profiter de la retraite à 62 ans et d'une durée d'assurance requise inférieure à 42 annuités.
A noter que l'âge automatique du taux plein pour les personnes n'ayant pas validé le nombre de trimestres requis reste fixé à 67 ans.
- Je suis né entre le 1er septembre et le 31 décembre 1961 ...
Si vous êtes nés dans cet intervalle de quatre mois, vous devez attendre d'avoir 62 ans et trois mois pour pouvoir partir à la retraite. Par ailleurs, votre durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein augmente d'un trimestre pour passer de 168 à 169 trimestres.
- Je suis né en 1962 ...
Votre durée d'assurance requise passe également de 168 à 169 trimestres pour pouvoir toucher une pension pleine. Par ailleurs, vous devez attendre jusqu'à vos 62 ans et demi pour arrêter de travailler.
- Je suis né en 1963 ...
En plus d'attendre d'avoir 62 ans et 9 mois pour cesser le travail, vous êtes la première génération à enregistrer une hausse de votre durée de cotisation de non pas un mais deux trimestres supplémentaires, à 170 trimestres, pour obtenir une retraite à taux plein.
- Je suis né en 1964 ...
Vous devez patienter jusqu'à vos 63 ans pour pouvoir partir à la retraite. Alors que la réforme Tourraine prévoyait déjà d'augmenter votre durée de cotisation à 169 trimestres pour que vous perceviez une retraite à taux plein, cette durée augmente encore de deux trimestres supplémentaires, à 171 trimestres.
- Je suis né en 1965 ...
Vous faites partie des Français les plus durement touchés par ces deux mesures phares du texte. D'une part, vous devez attendre d'avoir 63 ans et 3 mois pour arrêter de travailler. D'autre part, vous devez cotiser trois mois supplémentaires, 172 au lieu de 169, pour bénéficier d'une pension pleine.
- Je suis né en 1966 ...
Vous êtes la deuxième génération la plus sévèrement touchée puisque vous devez également cotiser trois trimestres de plus pour atteindre le seuil des 43 annuités. Par ailleurs, vous ne pourrez partir qu'une fois passé vos 63 ans et demi.
- Je suis né en 1967 ...
Comme les précédentes générations, vous enregistrez également un recul de trois mois de votre âge de départ qui s'établit à 63 ans et neuf mois. En revanche, la réforme Touraine prévoyait déjà que vous cotisiez un trimestre de plus, si bien que la nouvelle réforme des retraites n'ajoute que deux trimestres supplémentaires à votre durée d'assurance requise pour une pension à taux plein.
- Je suis né en 1968 ...
Vous êtes la première génération à atteindre le fameux seuil de 64 ans comme âge légal de départ. De même, votre durée de cotisation ouvrant à une retraite à taux plein passe aussi de 170 à 172 trimestres.
- Je suis né en 1969 ...
Votre situation est identique à la génération 1968 puisque vous devez aussi attendre vos 64 ans pour arrêter de travailler tout en recensant une hausse de deux trimestres de la durée de cotisation qui vous permet de toucher une pension pleine.
- Je suis né en 1970 ...
La sanction est moindre pour vous puisque la réforme Touraine vous imposait déjà 171 trimestres de cotisation si bien que cette durée n'augmente que d'un trimestre pour percevoir une pension à taux plein à votre départ en retraite. Vous devez également attendre vos 64 ans pour arrêter de travailler.
- Je suis né en 1971 ...
Votre situation est la même que pour la génération 1970 avec un trimestre de cotisation supplémentaire et un âge légal de départ fixé à 64 ans.
- Je suis né en 1972 et après ...
Vous êtes la toute dernière génération directement touchée par la nouvelle réforme des retraites puisque la réforme Touraine poussait à 172 trimestres la durée de cotisation des Français né en 1973. Cette durée donc de 171 à 172 trimestres si vous souhaitez bénéficier d'une retraite à taux plein tandis que votre âge légal de départ demeure à 64 ans.
• Quels sont les départs anticipés possibles?
Plusieurs exceptions au report de l'âge légal de départ sont prévues dans le texte, à commencer par les personnes en situation de handicap qui peuvent partir dès leurs 55 ans. C'est aussi le cas des personnes victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle qui peuvent cesser de travailler dès 60 ans au lieu de 62 ans dans le projet initialement présenté en janvier.
Le texte modifie également le dispositif "carrières longues" en introduisant deux nouvelles bornes d'âge. Auparavant, un salarié qui avait commencé à travailler avant 20 ans pouvait bénéficier d'un départ anticipé de deux ans tandis qu'un salarié entré dans la vie active avant ses 16 ans pouvait partir quatre ans plus tôt. Il existe désormais quatre bornes d'âge:
- J'ai commencé à travailler entre 20 et 21 ans ...
Dans le cadre de cette nouvelle borne d'âge, vous pouvez partir un an plus tôt, soit 63 ans.
- J'ai commencé à travailler avant 20 ans ...
Dans votre situation, vous pouvez partir deux ans plus tôt, c'est-à-dire au précédent âge légal de départ qui était de 62 ans, contre 60 ans avant cette réforme.
- J'ai commencé à travailler avant 18 ans ...
Cette seconde nouvelle borne d'âge introduite par la réforme vous permet de faire valoir votre droit à la retraite quatre ans plus tôt, soit 60 ans.
- J'ai commencé à travailler avant 16 ans ...
Dans votre cas, vous pouvez terminer votre carrière six ans plus tôt en cessant de travailler dès vos 58 ans.
Attention, ces règles ne valent qu'à condition d'avoir validé un certain nombre avant l'âge anticipé: 5 trimestres avant la fin de l'année civile, 4 avant la fin de l'année civile si né au dernier trimestre.
Si la réforme du dispositif carrières longues s'applique dès septembre, les assurés nés entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1963, ayant validé le nombre de trimestres suffisant l’année des 20 ans, et ayant 168 trimestres cotisés avant le 1er septembre 2023, pourront toujours avoir droit à un départ anticipé.
De leur côté, les fonctionnaires n'échappent ni au report de l'âge légal ni à l'allongement de la durée de cotisation, à l'exception des 20% d'agents en catégories dites "actives" et "super-actives".
- Je suis fonctionnaire de la police nationale, surveillant de prison ou contrôleur aérien ...
En tant que fonctionnaire de la catégorie "super-active", vous bénéficiez toujours d'un départ anticipé mais qui est décalé de deux années pour passer de 52 à 54 ans.
- Je suis infirmier, aide-soignant ou sapeur-pompier ...
Vous faites partie de la catégorie "active" des fonctionnaires et votre âge d'ouverture de droits à la retraite recule également de deux années, de 57 à 59 ans.
• Comment va se passer la fin des régimes spéciaux?
C'est une des mesures qui a suscité d'importants mouvements de grèves et de nombreuses actions de protestation dans plusieurs secteurs d'activité comme l'énergie ou les transports. La réforme des retraites prévoit de mettre un terme à la plupart des régimes spéciaux comme ceux des clercs et employés de notaire, de la Banque de France ou encore des membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Tous les salariés embauchés après le 1er septembre 2023 dans ces différents secteurs d'activité seront désormais rattachés au régime général tandis que les salariés actuels resteront affiliés à leur régime spécial selon la clause dite "du grand-père" qui s'applique déjà dans les rangs de la SNCF.
Voici deux exemples de régime spéciaux qui vont disparaître:
- Je travaille dans les industries électriques et gazières ...
En général, votre départ en retraite progresse de 60 à 62 ans à mesure que votre année de naissance s'approche de 1962. Si vous êtes nés après 1962, vous pouvez devez attendre d'avoir 62 ans pour pouvoir arrêter de travailler.
Si vous êtes un salarié en service actif ou insalubre, vous intégrez une catégorie à part. A condition d'avoir réalisé au moins 15 à 17 années de service, vous pouvez partir entre votre 55ème et 57ème anniversaire si vous êtes né avant 1967. Si vous êtes né après cette année, vous devez attendre d'avoir 57 ans.
- Je travaille à la RATP ...
Les salariés de la Régie autonome des transports parisiens sont classés en trois catégories. Si vous figurez parmi les employés administratifs, votre âge de départ progresse de 60 vers 62 ans. Pour tous ceux nés à partir de 1962, il est actuellement fixé à 62 ans.
Si vous faites partie du personnel de maintenance et êtes né avant 1967, votre âge de départ passe progressivement de 55 à 57 ans. Si vous êtes nés après 1967, votre âge de départ reste fixé à 57 ans.
Enfin, si vous êtes un agent d'exploitation et que vous êtes né avant 1972, votre âge de départ transite de 50 à 52 ans. Il demeure à 52 ans pour tous les agents nés après 1972.
• Qui va bénéficier de la revalorisation des petites pensions?
Il s'agit d'une mesure sociale qui avait cristallisé de nombreuses critiques à l'encontre du gouvernement et de sa communication sur le projet de loi. Après la présentation initiale du texte en janvier, plusieurs ministres semblaient entretenir le flou autour d'une pension minimale qui serait revalorisée pour atteindre jusqu'à 1200 euros bruts garantis pour tous les retraités.
En réalité, il s'agira d'une revalorisation du minimum contributif dans la limite de 100 euros bruts qui ne profitera qu'à une très faible proportion de retraités, aussi bien actuels que futurs.
Pour bénéficier de cette revalorisation à hauteur de 85% du Smic net, le salarié devra témoigner d'une carrière complète cotisée à temps plein au Smic, les carrières à temps partiel ou hachées étant exclues.
- Je suis déjà à la retraite ...
À l'heure actuelle, la France compte 17 millions de retraités et 1,8 million d'entre eux seront concernés par la revalorisation qui oscillera entre 0 et 100 euros: elle n'atteindra 100 euros que pour 125.000 d'entre eux. D'après une évaluation communiquée par Olivier Dussopt il y a deux mois, 250.000 retraités actuels franchiront le seuil des 1200 euros bruts.
- Je suis un futur retraité ...
Chaque année, ce sont 800.000 Français qui partent à la retraite. Un quart d'entre eux seront concernés par la revalorisation de 0 à 100 euros mais ils ne seront que 10.000 à 40.000 à percevoir une revalorisation complète de 100 euros en fonction des générations. Enfin, le ministre du Travail a indiqué qu'ils seraient entre 10.000 et 20.000 à passer le seuil des 1200 euros bruts grâce à la réforme.
BFMTV organise une journée spéciale pour décrypter la réforme des retraites ce lundi 12 juin. Les journalistes de BFMTV et BFM Business répondront à vos questions sur vos conditions de départ à la retraite, avec les experts de l'Union Retraite.
