Comment sont estimés les prix des biens immobiliers atypiques comme le Stade de France
L'avenir du Stade de France va commencer à se dessiner: l'État va lancer les appels à candidatures pour vendre l'enceinte ou accorder une nouvelle concession pour l'été 2025. L'État va publier en parallèle deux appels à candidatures: un pour des acheteurs potentiels et un pour les entreprises intéressées par l'exploitation de ce stade, qui accueille manifestations sportives et culturelles depuis 25 ans.
Mais avant toute chose, il faut savoir combien coûte ce bâtiment. Et ça c'est le rôle de la DNID, la direction nationale d'interventions domaniales. Chapeauté par la Dgfip, ce service a pour mission d'estimer ces biens si atypiques. Alain Caumeil, son directeur, explique à BFM Immo que les services du Domaine en charge du contrôle des valeurs des transactions immobilières dans le secteur public estiment environ 90.000 biens par an (pour plus de 50 milliards d'euros), dont certains particulièrement singuliers, comme des arènes, des réseaux câblés, des oléoducs... .
Trois méthodes utilisées
"Pour le Stade de France, le chiffre de 400 à 600 millions d'euros ressort souvent, mais il s'agit d'une évaluation comptable, à savoir le coût de la construction et des parkings", évidemment recalculé à l'euro d'aujourd'hui, explique Alain Caumeil. Il ne s'agit donc pas de la valeur économique du Stade. Pour la connaître, il faut que la DNID soit saisie officiellement, ce qui n'est pas encore le cas. Mais le service se tient prêt et pour cela, il va recourir à trois types de méthodologies pour avoir une fourchette la plus précise. Ensuite, cela sera l'affaire d'une négociation entre les candidats à l'achat et le vendeur.
La DNID va tout d'abord comparer. "L'idée est de regarder les transactions de même nature, développe Alain Caumeil. Le problème est qu'en France, il n'y a pas eu de cession de stade. Nous allons donc nous intéresser à ce qui a été fait au niveau européen". La DNID regardera donc les ventes de stades en retenant des équipements comparables et déterminera une valeur à la place.
Ensuite, la direction nationale d'interventions domaniales va s'intéresser au cash flow. "Nous allons regarder les comptes d'un club avec les taux de rentabilité interne", précise Alain Caumeil qui ajoute : "Là également, nous allons avoir une difficulté. En effet, les clubs ont des comptes dans le rouge en France".
Et enfin, la DNID va appliquer une troisième méthode, à savoir quel serait le prix d'une réhabilitation à neuf. "Combien coûterait un stade si on devait le reconstruire?", explique Alain Caumeil. "De cette valeur sont déduits les coûts nécessaires à la mise à l'état de l'art de l'équipement. En fonction des stades, ces dépenses sont naturellement très variables mais représentent toujours des budgets importants".
Des acheteurs intéressés?
Ainsi, en recoupant ces trois méthodes, la DNID – une fois qu'elle sera saisie – sera capable de donner une valeur plancher du stade. Reste à savoir si l'Etat compte vendre et s'il y aura des acheteurs intéressés. Depuis 1995, c'est un consortium constitué des deux géants du BTP français Vinci et Bouygues (respectivement 2/3 et 1/3), constructeurs du stade, qui exploite l'enceinte situé à Saint-Denis créée pour la Coupe du Monde de football 1998. Signé à la va-vite entre les deux tours de l'élection présidentielle de 1995, le contrat de concession actuel a fait couler beaucoup d'encre, de frais d'avocats et de deniers publics.
Entre les contentieux juridiques initiaux, l'indemnité pour absence de club résident versée jusqu'en 2013, les compensations diverses comme récemment pour les travaux du RER B, le Stade a coûté cher à l'État. Et il va encore coûter de l'argent pour les JO. Pour compenser l'arrêt des activités, pour travaux, à compter du 1er décembre 2023, la facture -- "chiffrée en dizaines de millions d'euros" selon la Cour des comptes -- devrait se partager entre l'État et le comité d'organisation des JO.
Pour l'instant, le consortium qui gère le Stade de France, n'a pas dévoilé ses intentions. Les Fédérations françaises de football et de rugby (FFF et FFR), qui y jouent un certain nombre de matches, ont été informées du lancement du processus et devraient être plus associées, selon plusieurs sources. L'automne dernier, le président du PSG Nasser Al-Khelaïfi, en bisbilles avec la ville de Paris qui ne veut pas lui vendre le Parc des Princes, avait levé le doigt pour racheter l'enceinte de Saint-Denis. Mais ce scénario d'un PSG jouant au Stade de France laisse incrédule beaucoup de monde. Présentée elle aussi comme intéressée dans un article de presse cette semaine, la Fédération internationale de football (Fifa) a démenti l'être auprès de l'AFP.