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Hausse des prix dans l’alimentation: jusqu’où ira-t-on ?

En février, la hausse sur un an des prix alimentaires a pour la première fois surpassé celle de l'énergie. Et les négociations tarifaires entre industriels et grande distribution devraient aboutir à une nouvelle envolée au printemps du prix moyen du panier de courses des Français.

C’est une première. Les prix des produits alimentaires augmentent désormais, en France, à un rythme plus élevé que ceux de l’énergie. Selon l’Insee au mois de février, la hausse sur un an atteignait 14,5% en février. Alors qu'elle se limitait encore à 13,2% en janvier et à 12,1% en décembre. Ce sont désormais ces courses du quotidien et non plus le carburant, le gaz et l’électricité, qui font, le plus, grimper l’inflation en France.

Mais c’est aussi parce que les tarifs du gaz et de l’électricité ont beaucoup augmenté que les produits alimentaires coûtent plus cher. Les agriculteurs doivent débourser davantage pour payer des engrais chimiques dont la production requiert beaucoup de gaz.

Outre la matière première qu’ils paient plus cher, les industriels ont, eux, été contraints d’accepter des hausses de prix considérables pour conserver et emballer (verre, plastique, papier) les produits qu’ils livrent à la grande distribution. En fait, selon les secteurs, cette hausse des prix à la production a mis plus ou moins de temps pour se diffuser jusqu’au panier de courses des Français.

En Allemagne, la hausse atteint 20% et outre-Manche, près de 17%

Le phénomène n’a d’ailleurs épargné aucun pays. Chez nos voisins aussi se nourrir coûte bien plus cher qu’il y a un an. En Allemagne, l’équivalent fédéral de l’Insee, l’institut Destatis évalue la hausse des prix des produits alimentaires sur 12 mois à plus de 20%. Et au Royaume-Uni, on est aussi à un niveau supérieur à ce qu’on observe en France : + 16,8% selon les dernières données de l’office national des statistiques.

Mais il est vrai qu’en France, on s’attend à une nouvelle augmentation au printemps avec la fin ce soir à minuit des négociations commerciales entre les industriels et la grande distribution. Car ce bras de fer annuel a été plus tendu que jamais. Avec des propositions, du côté des industriels, que les centrales d’achats de la grande distribution ont parfois qualifiées de "délirantes". Jusqu’à +20%, expliquait le patron de Carrefour il y a quelques jours sans dire de qui émanait cette exigence. Tandis que Michel-Edouard Leclerc les jugeait "énormes".

Ce qui est sûr c’est que ce ne sont pas PME qui ont mis la barre le plus haut. Ce sont avant tout les grands groupes qui s’estiment presque incontournables. Et effectivement que c’est plus compliqué pour un supermarché de retirer de ses rayons le Coca Cola ou le Nutella que les galettes de la mère Poulard ou le pâté Henaff.

En décembre dernier, les dépenses alimentaires ont baissé, sur un an, de 9%

Il est néanmoins probable que cette année certains supermarchés choisiront de déréférencer, de sortir de leurs rayons des marques qui n’auront pas accepté de revoir leurs prétentions à la baisse. Carrefour ne vend plus de jus de fruits Tropicana. Le patron de Lidl a déjà prévenu que ce sera probablement le cas pour deux de ses fournisseurs habituels. Et les Leclerc, Carrefour, Intermarché, Système U, Auchan sont d’autant plus en position de force qu’ils entendent favoriser davantage leurs propres marques qui représentent déjà plus d’un tiers de leurs ventes.

Le risque c’est que si les prix des produits alimentaires continuent à augmenter, de moins en moins de consommateurs soient en mesure de suivre. Pour une partie d’entre eux, c’est déjà le cas. En décembre, selon les chiffres les plus complets dont on dispose –ceux de l’Insee- les dépenses alimentaires ont reculé de près de 9% par rapport à décembre 2021.

Cette baisse de 1,5 milliard d’euros par rapport à la même période de l’année dernière représente 52 euros de moins par ménage. Et que les consommateurs aient réduit leurs dépenses avec des prix en nette hausse constitue un problème tant pour les industriels que pour la grande distribution.

Pierre Kupferman
https://twitter.com/PierreKupferman Pierre Kupferman Rédacteur en chef BFM Éco