Hausse des prix et opérations marketing, comment les dealers se préparent aussi aux JO 2024
Pas de trêve estivale et encore moins olympique pour les dealers. A l'approche des Jeux olympiques de Paris, qui débuteront le 26 juillet, les trafiquants de drogue et les revendeurs semblent anticiper à la fois l'afflux de touriste, et donc l'afflux de consommateurs, mais aussi les difficultés liées à la vente, et notamment pour la livraison avec les restrictions de circulation dans les zones où les compétitions sportives se dérouleront.
Depuis plusieurs mois, et surtout depuis la crise du Covid-19, s'est développée le système "Uber shit". A savoir ce système de livraison de drogue à domicile après commande sur des boucles Telegram ou Snapchat. Et sur les réseaux, les dealers cachés derrière leurs écrans se préparent déjà à cette période. Tour Eiffel et logo olympique, arguments marketing obligent, le prix du gramme de cocaïne augmente. 70 euros pour 50-60 euros habituellement. Une hausse des prix pour les nouveaux clients.
La raison de cette augmentation? Les 16 millions de touristes attendus cet été dans la capitale. "C'est une stratégie commerciale classique, les trafiquants transposent le schéma classique de la vente à leur activité criminelle", relève Eric Henry, délégué national du syndicat Alliance Police, avant d'ironiser. "Quand vous louez une maison en haute saison, le prix est toujours plus élevé qu'en basse saison."
Une délinquance qui veut tire profit des JO
Une large bande du coeur de Paris mais aussi de nombreuses zones en Ile-de-France, qui accueillent les compétitions olympiques, seront perturbées. Avec une circulation réduite ou un contrôle des accès. Sur ce groupe Telegram, les revendeurs rappellent que les prix des stupéfiants vont évoluer "en raison des conditions de circulation très difficiles". "Nous sommes plus efficaces sur le terrain donc les individus ont de plus en plus recours aux réseaux sociaux", note Reda Belhaj, porte-parole du syndicat Unité SGP Police FO.
De l'avis de tous les policiers contactés, la stratégie des trafiquants n'a rien d'étonnant. "De façon générale, la délinquance s'adapte en permanence", déplore Thierry Clair, secrétaire général du syndicat Unsa-police. La période des Jeux olympiques ne fera pas exception, et les policiers en ont conscience. "Les dealers vont évidemment cibler les sites olympiques, il y a pour eux moyen de se faire énormément d'argent et l'augmentation des prix correspond au capital risque", abonde Eric Henry.
"Vu la présence policière qu'il y aura sur les sites, les contrôles qui sont prévus, ça va poser certains problème pour eux", relativise Thierry Clair. "On l'a vu pendant la période du Covid, il y a eu des difficultés d'approvisionnement."
La lutte contre les trafics reste une priorité
45.000 forces de l'ordre déployées le jour de la cérémonie des Jeux, 35.000 chaque jour de compétition, les autorités assurent avoir pris en compte ce risque. "La lutte contre les trafics de drogue reste une priorité", assure-t-on à Beauvau. Mardi 28 mai, une opération "place nette" a été menée à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), à quelques pas du village olympique des athlètes. Ce point de deal est bien connu. Quinze personnes ont été interpellées et 10 kilos de résine et d'herbe de cannabis, 48 téléphones ainsi que 20.000 euros en liquide ont été saisis.
Depuis plusieurs mois d'ailleurs, les opérations de police se sont intensifiées en Seine-Saint-Denis où se situe le village des athlètes mais aussi le centre aquatique olympique et le Stade de France.
En plus des trafics de stupéfiants, les autorités s'attendent à une hausse de toutes les formes de délinquance. Vol à la tire, vente à la sauvette, attaque à la diligence sur l'autoroute A1... Les Jeux olympiques vont être "un eldorado pour toutes les formes de délinquance", déplore Reda Belhaj, le porte-parole d'Unité SGP Police FO. La réorganisation et le redéploiement des effectifs, alors qu'une politique zéro congé est menée cet été pour les forces de l'ordre, est encore en cours de finalisation.
Par exemple, les policiers de la sous-direction de lutte contre l'immigration irrégulière seront redéployés. Ceux du Val-de-Marne viendront renforcer la Seine-Saint-Denis, ceux des Hauts-de-Seine, Paris. Les deux départements où il y aura le plus de compétitions olympiques. Interrogée par France Info, la procureure de la République de Paris Laure Beccuau a estimé que son parquet s'attendait à "une augmentation sur la volumétrie (...)", plus "qu’une véritable évolution des faits de délinquance que nous constatons sur la plaque parisienne". Le nombre de magistrats sera bien supérieur à celui d'un été lamba et une audience de comparution immédiate aura lieu tous les jours pendant la période des Jeux.