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"Il faut que ça s'arrête": ces ministres pressés d'en finir avec le gouvernement actuel

L'exaspération grimpe dans le camp présidentiel. Trois jours après le verdict des urnes, les ministres ne savent pas quand la démission du gouvernement Attal sera acceptée. Si certains appellent à la retenue et à faire leur devoir jusqu'au bout, d'autres s'impatientent.

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Quel gouvernement post-résultats des législatives? C'est la question que tous les députés se posent depuis le soir du second tour, mais Emmanuel Macron ne semble pas pressé de donner des réponses précises. Après avoir refusé la démission de Gabriel Attal, le calendrier pour la suite reste flou.

Une députée raille auprès de BFMTV: "Je ne crois pas que le président nomme un gouvernement avant les JO parce qu’il lui faut déjà six mois pour choisir la couleur de sa cravate".

Sauf que chez les ministres démissionnaires, élus ou réélus pour certains député, la pression monte. "Les ministres députés n’ont que jusqu’au 17 (juillet, NDLR) pour s’enregistrer et participer aux votes pour les postes à l’Assemblée!", presse l'une d'entre eux.

Dans sa lettre aux Français publiée ce mercredi 10 juillet, le maître des horloges ne semble pas vouloir accélérer le pas. "Ce que les Français ont choisi par les urnes – le front républicain, les forces politiques doivent le concrétiser par leurs actes", écrit-il pourtant.

"C'est à la lumière de ces principes que je déciderai de la nomination du Premier ministre. Cela suppose de laisser un peu de temps aux forces politiques pour bâtir ces compromis avec sérénité et respect de chacun", ajoute le chef de l'État.

"C’est le président qui a la main, c’est constitutionnel, ce n’est pas à nous de décider quand on part", philosophe un ministre. "Il y a un côté ridicule c’est certain, mais on n’est plus à ça près. Le bazar chez nous, ça n’est pas la première fois. Mais chacun peut comprendre que ça prend du temps. La situation est inédite et la suite imprévisible", tempère un conseiller ministériel.

"Lassitude générale"

Au second tour dimanche, les électeurs ont tranché: ils n'ont pas renouvelé leur confiance envers le camp présidentiel. Et ce dernier en doit une belle au front républicain très activement poussé par la gauche. "On a manqué d’humilité dans nos éléments de langage, les électeurs ont voulu sanctionner le président et s’il ne prend pas sa paume, ce serait un problème", estime ainsi un ministre auprès de BFMTV.

"On est nombreux à faire pression pour que le président nous libère, on est plus légitimes, on n’a plus de majorité. Il faut que ça s’arrête!", résume un autre.

L’un de ses collègues abonde: "En additionnant des choux et des carottes - NFP, RN, LR - le seul message c’est: on veut l’alternance".

"Il y aura un vrai sujet d’acceptabilité des Français face à cette situation si elle s’étendait", estime un chef de cabinet ministériel. "Un gouvernement repose certes sur du droit mais aussi sur de la légitimité politique. Au bout d’un moment, faut pas que ça s’éternise trop..."

"Il y a une lassitude générale", décrypte une source gouvernemental pour expliquer ce ras-le-bol. "Personne n’a eu le temps de digérer la dissolution et on a tous dû repartir en campagne. Là, ça redescend et donc il y a un contre-coup qui s’installe. Pour ceux qui sont là depuis le début, c’est des sensations déjà vécues lors des remaniements où tout s’arrête et chacun attend de voir qui sera viré", explique-t-il.

Une histoire de dates

Selon une membre de l'exécutif, "Attal a dit ok (pour tenir le gouvernement), mais jusqu’au 17 seulement, sinon les ministres élus députés ne pourront pas voter au moment de la répartition des postes à l’assemblée le 18 juillet alors que les députés ministres d’un gouvernement démissionnaire peuvent siéger et moi, je veux siéger".

D’ailleurs du côté du Premier ministre, l’un de ses proches assure qu’il "n’a pas lâché l’idée de prendre la présidence du groupe Renaissance":

"Gabriel Attal a deux options: soit il prend la tangente d’ici le 18, soit il se plie à ce que veut le président, il met quelqu’un à la présidence du groupe 'par intérim', mais il faut espérer qu’on la lui rende ensuite… Mais c’est pas dit".

D’ailleurs une question très pragmatique va rapidement se poser avec la nouvelle Assemblée. "Je ne vois pas quel intérêt a le président à refuser un gouvernement démissionnaire qui s’exposerait par conséquent à une motion de censure", analyse un autre ministre pour qui ce n’est "plus qu’une question de jours".

Mais combien précisément? Dans l'attente de la "majorité solide" qu'il réclame, Emmanuel Macron précise dans sa lettre que "le gouvernement actuel continuera d’exercer ses responsabilités puis sera en charge des affaires courantes comme le veut la tradition républicaine".

Quelle photo pour le 14 juillet?

Il faut dire que l'agenda des semaines à venir est chargé, avec les Jeux olympiques et paralympiques en ligne de mire. "Ce ne serait pas une attitude républicaine de sa part de dire: on passe les JO", réagissait un ministre

"Je ne serai pas sur la tribune ministérielle le 14 juillet", a déjà tranché un membre du gouvernement. "C’est ridicule, quel message on enverrait aux Français? Que tout continue comme avant? Si on donne l’impression de tordre l’élection, en se maintenant ou via une alliance, cela donnera le sentiment qu’on s’accroche à un pouvoir et ce sera politiquement dévastateur", fustige-t-il.

Le Premier ministre Gabriel Attal et des membres du gouvernement, le 16 janvier 2024, lors d'une conférence de presse à l'Elysée. - Ludovic MARIN / AFP

Mais pas de quoi empêcher le président de procrastiner selon ceux qui en ont désormais l'habitude. "Le président n’en a rien à faire de ça. L’an dernier on se posait tous la question de la photo du 14 juillet (...) Finalement tout le monde était là alors que quelques jours après, c’était fini pour eux", rappelle la conseillère d’un ministre qui l’a vécu.

En 2023, après la mobilisation contre la réforme des retraites, les émeutes qui ont suivi la mort du jeune Nahel et le scandale du Fonds Marianne, Élisabeth Borne a fini par nommer un nouveau gouvernement le 20 juillet.

Dernier Conseil des ministres vendredi?

C'est l'hypothèse à laquelle tous se raccrochent: un dernier Conseil des ministres pour la fin de semaine, ou début de semaine prochaine. "Je ne peux pas imaginer qu’il n’y ait pas de Conseil des ministres vendredi ou lundi, sinon ça ferait pas de Conseil des ministres pendant quinze jours", calcule un ministre qui veut y croire.

"Une fois ce Conseil des ministres passé, on a espoir que la démission du Premier ministre soit enfin acceptée", ajoute un conseiller.

Car va se poser également la question des nominations pour la rentrée qui ne peuvent plus être actées une fois qu’un gouvernement est démissionnaire.

"Le président veut encore faire des nominations pour lesquelles il est obligé d’avoir un gouvernement en dur", note l’un de ses collègues: "En général, les conseils de nomination se font fin juin début juillet, pour des raisons fonctionnelles, et permettre aux gens de s’organiser avant la rentrée. Là, il y a de préfets en attente de nomination, comme chaque été."

"C'est le bordel et Macron adore ça"

Au moment d'annoncer sa démission au soir des européennes, Gabriel Attal a assuré qu'il poursuivrait sa fonction "aussi longtemps que le devoir l'exigera". Une ligne partagée par d'autres membres de l'exécutif. "On est toujours ministre donc on assume aussi nos fonctions", dit l'un d'entre eux. Même son de cloche chez une autre: "Se poser la question de notre présence ou non, c’est pas bien, on doit être à notre poste jusqu’au bout".

Certains n'hésitant pas à tancer l'impatience des autres. "Il faut arrêter avec les états d’âme, ça ne doit pas être l’affaire de sa petite personne", s’agace un conseiller de premier plan.

"Dans une entreprise, on ne se barre pas comme ça, sans préavis. Quand on est nommé ministre ça devrait être un honneur. La moindre des choses, c’est d’aller jusqu’au bout du job. Surtout quand on est payé à ne plus rien faire ou presque", recadre-t-il.

Lui-même, comme beaucoup de ses collègues, est désormais activement à la recherche d’un nouvel emploi.

Une source au sein de l'exécutif résume finalement la situation chaotique actuelle: "C'est le bordel!" Avant d'ajouter, illustrant l'agacement de certains: "Et Macron adore ça. On est tous à sa merci, il ne va pas se priver pour nous rappeler que c'est le maître des horloges, et qu'il nous démet quand il veut. C'est d'ailleurs pour ça qu'au sein de la majorité, plus personne ne peut le blairer."

Le service politique de BFMTV, avec Hortense de Montalivet