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"Il ne récidivera pas": les victimes de l'ex-prêtre Bernard Preynat réagissent à l'annonce de sa mort

Bernard Preynat lors de son procès, le 13 janvier 2020, à Lyon.

Bernard Preynat lors de son procès, le 13 janvier 2020, à Lyon. - Philippe Desmazes - AFP

Condamné en 2020 pour agressions sexuelles sur mineur, l'ancien prêtre Bernard Preynat est mort dans sa salle de bain, quelques semaines après sa libération sous bracelet électronique de prison.

L'ancien prêtre Bernard Preynat est mort ce dimanche 23 juin, quelques semaines après avoir été libéré sous bracelet électronique de la prison de Riom pour agressions sexuelles sur plusieurs mineurs. Pour les victimes du père Preynat, dont nombres n'ont pu porter plainte en raison de faits prescrits, cette nouvelle marque la fin d'une ère, mais pas la fin d'un combat.

"En tant que médecin, je ne peux pas me réjouir du décès de quelqu'un", explique Bertrand Virieux, victime du père Preynat, sur BFM Lyon. "Je me dis juste qu'au moins, nous, on nous a souvent appelés les survivants pour parler des enfants victimes d'abus, et bien en fait, on lui a survécu."

"C'est ça que je retiendrai", ajoute-t-il. "C'est que finalement, entre les 'gentils' et les 'méchants', et bien c'est le méchant qui a perdu jusqu'au bout."

"Une page qui se tourne"

"Pour nous, c’est une page qui se tourne", lance à son tour Pierre-Emmanuel Germain-Thill, ancien porte-parole de l’association dissolue en 2021 "La Parole Libérée", créée par des victimes du diocèse de Lyon, sur l'antenne sur France info. "Avec son décès, une certitude, celle qu’il ne récidivera pas", renchérit-il dans les colonnes du Progrès.

Néanmoins, ce qui a vraiment surpris les victimes de l'ancien homme d'Église, c'est que Bernard Preynat soit mort dans sa salle de bain, car la plupart comme Pierre-Emmanuel Germain-Thill n'ont pas été informés de sa libération sous bracelet électronique quelques semaines plus tôt.

"On devait avoir une suite de cette demande qui avait été faite par lui en fin d'année dernière. Il n'a donc pas effectué toute sa peine, on va dire qu'il y a une justice divine aujourd'hui si elle existe", explique-t-il sur France info.

Une "justice divine" qui, comme le note l'ancien porte-parole, est arrivée un dimanche, jour du Seigneur. "Châtiment divin peut-être", s'interroge-t-il encore auprès de l'AFP. "Tout un symbole."

"Cela ne change rien"

"Je ne suis pas submergé par l'émotion du décès de Preynat. Je n'ai ni haine, ni joie, ni apaisement. Tout ça est rangé pour moi", témoigne lui aussi François Devaux, fondateur de "La Parole Libérée", sur BFM Lyon.

Il met surtout en avant les nombreux enfants qui restent victimes d'abus sexuels au sein de l'Église, bien que de grandes affaires comme celle de Bernard Preynat ont libéré la parole. "Cela ne change rien, tout comme sa peine qui lui a été infligée", estime-t-il également dans les colonnes du Progrès.

"Je pense que c’est un grand soulagement pour la hiérarchie catholique, contrairement à ses victimes", estime-t-il. "Il y a eu condamnation de l’homme mais en aucun cas du système."

"L'institution catholique n'a pas beaucoup avancé sur ces questions de pédocriminalité. (...) Les lois ont évolué, c'est long. L'institution républicaine, elle, a avancé. Un peu, mais elle a avancé", ajoute-t-il sur l'antenne de France 3 Rhône-Alpes.

Les inactions de l'Église de nouveau pointées du doigt

En 2020, l'ancien prêtre Bernard Preynat avait été condamné à cinq ans de prison ferme, pour des agressions sexuelles commises sur des dix jeunes scouts entre 1971 et 1991. Une condamnation retentissante en France.

En 2021, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase) a rendu un rapport estimant qu'en France, au moins 2,5 % à 2,8 % de prêtres et religieux ont commis des agressions sexuelles ou des viols sur environ 216.000 victimes.

À la suite de ce rapport, une série de mesures a été prise par les évêques, quelques mois plus tard. Ils reconnaissent notamment "la responsabilité institutionnelle de l’Église dans les violences qu’ont subies tant de personnes victimes" ainsi que le "devoir de justice et de réparation".

Néanmoins, ces mesures ne sont pas assez concrètes pour François Devaux. Si des "recommandations" ont été émises, "combien sont-elles aujourd’hui vraiment mises en œuvre?", se questionne-t-il.

La date des obsèques de Bernard Preynat n'est quant à elle pas encore connue.

Juliette Moreau Alvarez