Les acteurs de l'immobilier craignent "d'être sacrifiés sur l’autel de la discorde politique"
Ils craignent d'être les éternels oubliés. Au lendemain des élections législatives, les acteurs de l'immobilier s'inquiètent pour la suite. Le président de la Fnaim se désole auprès de BFM Immo de "voir que le pays ne dispose plus de majorité à l'Assemblée, pourtant indispensable pour adopter de nombreuses dispositions en faveur du logement".
"Le logement a été abandonné pendant sept ans, il n'a pas été un grand centre d'intérêt pour la macronie. On a peur que ça soit identique pendant la période à venir", confie Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim).
Le nouvel hémicycle apparaît en effet plus divisé que jamais. Dimanche soir, le Nouveau Front populaire est arrivé en tête avec 182 députés, un nombre toutefois insuffisant pour disposer d'une majorité absolue (289 sièges). Le camp présidentiel termine deuxième avec 163 élus, et le RN à la troisième place avec 143 députés.
Dans cette configuration, proposer un gouvernement qui ne risquerait pas de subir une motion de censure semble difficile. Et même si un Premier ministre parvient à rester en place, faire voter des lois ne sera pas une mince affaire.
"Il va falloir tout reconstruire"
"On craint que le logement ne préoccupe pas vraiment cette nouvelle Assemblée. Une nouvelle feuille de route ça va demander du temps, et le logement ne mérite pas d'être sacrifié sur l’autel de la discorde politique", lance Loïc Cantin.
D'autant que la Fnaim attendait plusieurs mesures, mises en suspens par la dissolution. "Sur la location saisonnière, la rénovation énergétique, l'indécence du parc locatif, la portabilité des prêts, la loi sur la simplification: un ensemble de pistes vont être abandonnées, il va falloir tout reconstruire", regrette son président.
De même, Norbert Fanchon, président du Groupe Gambetta (promoteur immobilier et bailleur social) regrette ce coup d'arrêt alors que le logement était revenu dans les sujets de campagne. "Je crains que le soufflet ne retombe."
Le logement, un sujet "transpartisan"?
Même son de cloche du côté des agences immobilières, qui appellent le nouvel exécutif à ne pas abandonner le secteur, en crise depuis deux ans. "Quel que soit le prochain gouvernement, il faudra que le logement soit une priorité nationale", plaide Éric Allouche, directeur exécutif de Era Immobilier.
"Il faut l'appréhender de manière transpartisane parce que tout le monde a besoin de se loger, le logement est un facteur de cohésion sociale", estime-t-il auprès de BFM Immo.
Il espère des politiques publiques en faveur de l'offre, notamment avec "des incitations à l'investissement locatif" mais aussi "en réduisant les contraintes notamment sur la lutte contre le réchauffement climatique avec un calendrier tenable".
Mais ce n'est pas si simple, car les différents camps ont chacun leur vision d'une politique du logement efficace et ne portent pas les mêmes projets. Norbert Fanchon espère néanmoins que certaines propositions puissent se frayer un chemin législatif. Selon lui, l'élargissement du prêt à taux zéro pourrait, par exemple, faire consensus.
De même, la construction de nouveaux logements sociaux fait selon lui partie des mesures présentes dans le programme du Nouveau Front populaire qui pourraient convaincre au-delà. "Pour ça, il faut que le budget de l’État soit capable d’assumer ces dépenses publiques, ce n'était pas le sens dans lequel allait le précédent gouvernement", note-t-il.
"J'ai le sentiment qu’on fait enfin le lien entre logement et pouvoir d'achat, maintenant il faut passer du discours aux actes", poursuit Norbert Fanchon.
En attendant, le risque est aussi que le marché de l'immobilier poursuive dans l'attentisme dans lequel il était plongé depuis les élections européennes. Malgré cette période d'incertitude, Éric Allouche conseille de continuer à acheter et à vendre. "Les prix sont relativement stables, les taux ont baissé, il faut en profiter", conclut-il.