Oreillette, Cerise, Idéale, Ovalie… comment choisit-on la vache égérie du Salon de l'agriculture?
La star du Salon de l'agriculture, c'est sa vache égérie. Ovalie, Valentine, Neige, Filouse… Comme chaque année, le traditionnel rendez-vous agricole parisien s'est choisi une "vache égérie" pour le représenter sur toutes les affiches et jouer le rôle d'invitée d'honneur.
Pour l'édition 2024, c'est Oreillette qui accueille les visiteurs dans son enclos à l'entrée du pavillon 1. La vache normande est venue de l'Orne pour s'installer une dizaine de jours au parc des expositions de la porte de Versailles. Très populaire auprès du grand public, la vache est bombardée de photographies.
La désignation d'une vache égérie est relativement récente au regard de la longévité de l'événement agricole, qui ouvre sa soixantième édition cette année. Une vache – et uniquement une vache – incarne le "visage" du SIA sur ses affiches depuis le début des années 2000. Mais c'est seulement à partir de l'édition 2011, avec la vosgienne Candy noire et blanche, que l'on mentionne le nom, la race et l'âge de l'animal. Depuis, l'égérie n'a cessé de gagner en exposition médiatique. Une communication efficace pour les organisateurs du Sia, qui ont soigneusement choisi leur muse annuelle.
"On me parle encore de Cerise aujourd'hui"
"C'était énorme en termes de notoriété: cela remonte à huit ans mais on me parle encore de Cerise aujourd'hui", assure Joël Sillac, éleveur de l'égérie 2016.
Avant d'arriver à Paris, l'égérie est passée par un long processus de sélection. Bleue du Nord, Bretonne Pie-Noire, Abondance ou encore Flamande: au printemps, les races volontaires se portent candidates auprès des organisateurs, par la voix des organismes de sélection (OS) des races bovines.
Le jury, composé de la direction du SIA et de représentants d'éleveurs, dévoile sa décision au début de l'été, après avoir tenu compte de l'alternance habituelle entre vaches laitières et vaches à viande, mais aussi d'un équilibre entre les territoires et entre les races à petits et à grands effectifs.
"Qui a de la gueule"
La main passe alors à l'organisme de sélection de la race choisie, chargé de sélectionner la future vache égérie et son éleveur. "Il fallait une vache qui ait de la gueule" et "qui ait toutes les qualités" pour être représentative de la race bazadaise, se rappelle Joël Sillac, évoquant un "travail collectif" pour promouvoir cette race du Sud-Ouest à petits effectifs. Cerise, morte accidentellement quelques mois après le SIA, avait déjà l'habitude des concours. Un atout pour passer sous le feu des projecteurs, d'autant que la médiatisation de l'égérie a véritablement décollé cette année-là.
Idéale, elle, était l'égérie de l'édition 2020. Jean-Marie Goujat se rappelle sa surprise lorsqu'on lui a annoncé que son élevage avait été choisi pour représenter la race charolaise, l'une des principales races à viande en France.
"On est venu nous chercher, ce n'était pas du tout notre intention", explique l'éleveur.
L'élevage familial est installé à 45 km de Charolles, berceau de la race, un critère qui a pesé dans la balance. Le choix s'est facilement porté sur Idéale, une vache au caractère docile et maternel – elle vient de fêter ses dix ans et s'apprête à mettre bas dans quelques semaines.
"Ce n'était ni la plus grande, ni la plus grosse, mais elle était le type même de la race charolaise", se souvient Jean-Marie Goujat.
À l'été, lors de la traditionnelle séance photo pour lui tirer le portrait, l'animal se laisse faire malgré la dizaine de personnes qui lui tournent autour dans son pré. Idéale n'est pourtant pas une habituée des concours, elle n'a jamais participé à un seul d'entre eux. Pour l'habituer à la foule, ses éleveurs l'inscrivent à la foire de Beaucroissant, où elle passe trois jours quelques mois avant l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris. Un passage sans encombre pour Idéale, qui aura participé tranquillement à toutes les (nombreuses) préparations nécessaires à son futur rôle d'égérie.
2 jours par semaine
Et c'est autant la vache que l'éleveur qui est choisi. Le Sia "demande quelqu'un qui s'exprime bien, qui n'a pas peur de parler devant les caméras", explique Joël Sillac.
Une fois l'animal élu, l'éleveur doit ensuite consacrer une bonne partie de son temps à répondre aux sollicitations des journalistes et des organisateurs, de plus en plus nombreuses à l'approche du jour J.
"J'y consacrais deux jours par semaine", se souvient Jean-Marie Goujat, pour qui "s'organiser pour dégager du temps" a été "le plus gros défi".
Le SIA propose même quelques séances de formation aux médias.
Malgré la charge de travail supplémentaire, l'égérie est une opportunité inégalée pour promouvoir la race mise à l'honneur, auprès du grand public comme du monde agricole. "J'en garde de très bons souvenirs. Le plus rigolo, quand on arrive à Paris, c'est de voir sa vache sur toutes les affiches, sur les bus, dans le métro", sourit Joël Sillac.