Un gouvernement NFP, une alliance Ensemble-LR... Les 5 scénarios possibles après les législatives
La France sera-t-elle gouvernable? Les Français ont massivement fait barrage à l'extrême droite ce dimanche 7 juillet lors du second tour des élections législatives. Conséquence de cette mobilisation, le Nouveau Front populaire est la plus grande force politique de la nouvelle Assemblée nationale, avec 182 députés, mais cette coalition de gauche reste loin de la majorité absolue.
Moins de deux heures après l'annonce des résultats, Gabriel Attal a annoncé qu'il remettra sa démission à Emmanuel Macron ce lundi 8 juillet. Le président de la République sera donc chargé de nommer un nouveau Premier ministre, qui lui proposera de former un nouveau gouvernement.
Au lendemain du second tour des élections législatives, BFMTV fait le point sur les cinq scénarios possibles, compte tenu de la composition de l'Assemblée nationale.
• Scénario 1: un gouvernement NFP
Avec plus de 180 députés, le Nouveau Front populaire sera la plus grande force à l'Assemblée nationale.
Emmanuel Macron a donc "le devoir d'appeler le nouveau Front populaire à gouverner", a tranché Jean-Luc Mélenchon.
En l'absence d'une majorité absolue, les insoumis proposent de faire passer une partie de leur programme (hausse du Smic, blocage des prix, abrogation de la réforme des retraites, notamment) par décret.
Un gouvernement du Nouveau Front populaire devra toutefois ne pas voir de motion de censure être voté contre lui à l'Assemblée nationale pour ne pas être renversé. Et donc convaincre une partie des députés de la coalition présidentielle Ensemble de ne pas en voter une qui serait déposée par la droite ou l'extrême droite.
Il est possible d'être minoritaire et de gouverner malgré les motions de censure: Elisabeth Borne et Gabriel Attal l'ont fait pendant deux ans, Les Républicains ne votant jamais en totalité la censure du gouvernement.
• Scénario 2: un gouvernement Ensemble-LR
Véritable serpent de mer politique depuis 2022, l'alliance avec les Républicains pourrait permettre à la macronie de se maintenir à flot. Selon le décompte d'Elabe, 231 députés Ensemble, Les Républicains, divers droite ou UDI ont été élus à l'Assemblée nationale ce dimanche 7 juillet.
"Le pays est à droite. On doit gouverner à droite. Et ne pas avoir de coalition avec La France insoumise et Nouveau Front populaire", a assuré à BFMTV Gérald Darmanin, ancien fidèle de Nicolas Sarkozy.
"Nous tendons la main aux Républicains", a lancé sur BFMTV Benjamin Haddad, député Ensemble et ancien secrétaire national de l'UMP. "Je le dis depuis deux ans, je souhaite qu'on travaille avec eux."
Sur BFMTV, le LR Geoffroy Didier a demandé à ce que "la droite indépendante reste libre et ne s'acoquine pas avec Emmanuel Macron qui s'est lui même acoquiné avec la gauche voire l'extrême gauche pour bloquer le Rassemblement national".
Dans le cas où un accord serait trouvé, le futur gouvernement pourrait tomber par une motion de censure si elle est votée par le Nouveau Front populaire (182 députés) et le Rassemblement national (147). Sauf accord d'abstention avec certains partis.
• Scénario 3: une coalition "à l'allemande"
La solution sera-t-elle ailleurs? "La gauche veut gouverner, mais ne gouvernera jamais", estime un cadre Renaissance auprès de BFMTV. "Un Premier ministre NFP tombe en trois jours."
"Il va falloir entrer dans une coalition à l'allemande et ça va prendre du temps", plaide-t-il.
Outre-Rhin, il est courant que des partis aux idéologies différentes s'allient une fois les résultats des élections connus pour former une majorité. Socialistes et conservateurs ont donc parfois gouverné ensemble ou avec le centre ou les écologistes ces dernières années. Mathématiquement, une coalition PS-Ensemble-LR rassemblerait par exemple 296 députés, soit une courte majorité.
Mais en France, une telle alliance n'a jamais été réalisée sous la Vème République. Surtout, les principaux partis du Nouveau Front populaire semblent exclure dès ce soir un tel scénario.
"Nous n'aurons qu'une seule boussole, celle du programme du Nouveau Front populaire", a ainsi lancé dès l'annonce des résultats Olivier Faure. Le Premier secrétaire du PS a répété son souhait d'abroger la réforme de l'assurance-chômage et de taxer les superprofits.
• Scénario 4: un gouvernement technique
Reste le scénario d'un gouvernement dit technique qui serait composé d’experts (économistes, hauts-fonctionnaires, diplomates..) eux-mêmes chapotés par une personnalité consensuelle à Matignon.
Un concept un peu flou en France qui n'a jamais existé sous la Ve République. La France a bien connu un gouvernement d'union nationale qui réunissait presque tous les partis (en dehors du PCF) comme celui de Michel Debré (1959-1962). Des "techniciens" ont bien été à la tête de gouvernements comme Raymond Barre en 1976 ou Jean Castex en 2020. Mais les deux avaient un mandat politique et une majorité à l'Assemblée.
Très concrètement, il s’agirait d’une super administration chargée d’assurer la continuité de l’État: faire en sorte que les fonctionnaires et les factures soient payés, que les ressources nécessaires soient allouées aux administrations et que les centaines de milliards d'euros dont la France a besoin pour se financer soient bien levés sur les marchés. Le strict minimum. Sur la question de la fiscalité par exemple, il serait a priori cantonné au statu quo.
• Scénario 5: la crise institutionnelle
Mais même un gouvernement technique serait toujours sous la menace d'une motion de censure déposée par le Nouveau Front populaire, Les Républicains ou le Rassemblement national. Si aucun des scénarios précédents ne fonctionne, la France entrerait donc dans une profonde crise institutionnelle, Emmanuel Macron ne pouvant dissoudre l'Assemblée nationale avant juillet 2025.
"S'il n'y a pas de majorité, la solution pour sortir de l'impasse, c'est que lui (Emmanuel Macron, NDLR) s'en aille", assurait avant le second tour Jean-Luc Mélenchon. "C'est normal, c'est lui qui est responsable de la pagaille."
L'ancien candidat à la présidentielle a alors invoqué une référence historique pour illustrer son propos. Celle du cartel des gauches en 1924. Cette coalition avait réussi à obtenir la démission du président Alexandre Millerand, après avoir "rejeté tous les gouvernements" en boucle.
Un tel scénario ne s'est jamais reproduit depuis l'instauration de la Ve République. Le principal intéressé, Emmanuel Macron, avait déclaré au lendemain de la dissolution de l'Assemblée nationale exclure de démissionner de la présidence de la République. "Quel que soit le résultat" des élections législatives.